CRÉER DE L’ESPACE, CRÉER DU LIEN, TROUVER L’ÉLAN

Point de départ : une constatation=nous vivons tassés, accentuation des courbures vertébrales avec nos ceintures plus ou moins bridées, la pelvienne par des raideurs  liées à la présence de grosses zones tendino-aponévrotiques et notre position assise habituelle (voiture, chaise…avec le bassin rétroversé), la scapulaire par notre attitude en voussure dorsale et en rotation interne d’épaule (lecture, travail au bureau, smartphones…) et une dose de stress variable  pour chacun mais presque toujours présente.

Un jour nous en prenons conscience, un éclair de lumière surgit : ça peut être autrement…alors commence un cheminement.

Le Yoga peut être une voie de passage vers un horizon plus radieux.

L’élan évoque, autant sur le plan physique que mental, plusieurs notions :

Légèreté, globalité, propulsion, dynamisation

Calme, décision, confiance…car comment s’élancer sans confiance ?

Nous allons envisager

1/ pour aller vers le calme : la respiration, l’écoute de la sensation

2/nous sommes une structure tenségre

3/sentir la légèreté

4/vivre la propulsion

ultérieurement

5/étude détaillée de quelques postures clefs (EN ATTENTE)

1/ cheminer vers le calme et la détente grâce à la respiration et l’écoute de la sensation

La détente profonde est ce qui nous manque le plus mais nous n’en avons guère conscience. Nous évaluons mal notre degré de tension physique et psychique. A partir d’un état de base nous percevons au gré des jours des pics et des creux mais le niveau de l’état de base nous échappe tant il nous est coutumier, constitutionnel et sur une échelle de UN (détente maximale) à DIX (tension extrême) nous sous estimons toujours l’endroit où nous nous trouvons.

Se détendre doit être notre premier objectif, aller vers le silence corporel et mental, le grand luxe !!

Deux outils de base : le souffle et la rotation de la conscience ou l’écoute de la sensation

Le premier outil de base, central, primordial est le souffle.

 L’écouter. L’aider à ralentir. Se laisser porter. Ralentir le souffle va calmer le mental, ralentir et diminuer l’incessant bavardage déjà cent fois ruminé. Laisser le temps au souffle, ne pas le couper, ne pas le hacher ni lui commander. Épouser son mouvement. Dans la respiration au quotidien, l’inspire est le temps actif même s’il est très limité, la plupart du temps inconscient et l’expire est passif lié à l’élasticité des tissus pulmonaires. Ici nous inversons le processus : l’expire est le temps actif, l’inspire le moins possible. Mieux vider pour bien remplir, plus exactement mieux vider afin que ça se remplisse mieux

Épouser le mouvement de l’expire, s’y glisser et sans forcer, participer à son étirement, son allongement puis attendre qu’un inspire s’enclenche et accueillir l’air plutôt que le prendre, ouvrir, offrir son espace et laisser le souffle le dilater, l’expanser, attendre la fin du mouvement sans le couper volontairement, se laisser surprendre, étonné devant la douceur et l’étirement de ce souffle. Attendre qu’un expire arrive. Puis repartir avec ce mouvement comme si on nageait dans le sens du courant et participer sans forcer. Les vagues se suivent mais ne sont pas toutes identiques, laisser faire…..simplement essayer d’être là tout en s’effaçant, observer sans commander…tout un programme pour les occidentaux du 21°siècle que nous sommes. Cesser de manipuler. Accueillir. L’idée étant de se laisser porter par le souffle, ressentir cela,ressentir la confiance profonde que procure cette sensation. Être porté !

Tout devient facile, léger.

Le souffle et la respiration sont deux phénomènes à la fois très liés et très différents. La respiration nous ramène à notre moi biologique, à nos échanges gazeux à « je »..…Le souffle est beaucoup plus vaste il nous enveloppe, nous relie aux autres, au monde.

Selon l’endroit où l’on place sa conscience la perception du souffle se modifie  instantanément, la respiration elle ne change pas. Par exemple au niveau des narines selon que l’on focalise notre attention sur l’entrée des narines, le milieu du nez ou la zone des parfums tout en haut du nez. Le changement est immédiat d’une respiration à l’autre. De même avec des mudra, ou d’ailleurs aussi avec des positions de pieds. D’où la proposition pour essayer d’avoir une sensation d’expansion multidirectionnelle, de placer la conscience au centre du corps soit donc dans le ventre entre paroi antérieure et postérieure à quelques centimètres sous le nombril (zone du hara ou de l’œuf des nadis). Faire comme si le souffle pénétrait en nous par cet espace et se retirait de même par cet espace.

Ce souffle lent (sans excès, sans forcer), sans régularité métronomique (ce qui est toujours le signe que le mental a repris le pouvoir), si possible peu bruyant voire inaudible, est pourvoyeur d’un grand calme. Peu à peu, dans la vie quotidienne, la confiance remplace l’inquiétude, le sentiment de vivre une réponse remplace le harcèlement des questions incessantes.

Avec une certaine pratique vivre cela en assise est assez facile mais il faut aussi essayer de garder ce souffle dans les postures, même toniques. Dans cette optique il faut ralentir le mouvement, car cela ralentit le souffle. Cela se fait peu à peu, au cours des années…

Le deuxième outil de base est la rotation de la conscience dans la matière, c’est l’écoute de la sensation. Il est en partie tributaire du précédent car si le souffle est court le temps nécessaire à la prise de conscience n’est pas suffisant.

La lenteur est nécessaire, elle interpelle la conscience.

Comme une pile électrique peut éclairer un secteur d’une zone obscure, notre conscience peut se promener dans notre matière pour nous permettre de la connaître un peu mieux. Relâcher les zones myo-fasciales inutilement ou excessivement mises en tension ou au contraire plutôt en hypofonctionnement. Créer de l’espace dans les zones en compression ou en fermeture. Bien sentir les étirements de peau. Percevoir les alignements des différentes zones et des zones entre elles. Le souffle porte le mouvement et le temps du mouvement est inclus dans celui du souffle, aussi bien en expire qu’en inspire. C’est déjà dharana ( la concentration).

Pendant les inspires « surfer » sur la vague, ouvrir des espaces grâce à des micro mouvements peu visibles de l’extérieur mais au combien efficients, relâcher les tensions parasites qui limitent nos mouvements et représentent de plus une dépense inutile et nuisible.

Pendant les expires, d’abord bien expirer (car cela va conditionner la vague de l’inspire), éventuellement contracter doucement les zones en tension pour leur permettre une meilleure décontraction à suivre sur l’inspire car un muscle qui a été contracté se laisse ensuite mieux étirer, éventuellement revoir ou corriger certains alignements …

Bref cette rotation de la conscience, permanente, fais la différence entre se servir de son corps pour faire un mouvement ou vivre et habiter son corps à l’occasion d’un mouvement.

2/ nous sommes une structure tensègre et même plus exactement biotensègre.

La notion de tenségrité, relativement récente, environ la moitié du XX siècle, est apparue dans le domaine architectural et artistique. Ce mot est né de la contraction de « tension et integrity ». Il s’agit de créer un volume sans empilement, façon habituelle de procéder : une maison en est l’exemple typique. Comment faire ?

Il y a bien sûr le ballon et le cerceau ou la roue qui sont deux façons d’agencer des forces de compression et d’expansion  équilibrées et stables, donc des systèmes autocontraints. L’architecte Fulher a eu l’idée de faire tenir ensemble des parties solides porteuses de forces de compression (parties qui ne se touchent pas) maintenues ensemble par des câbles porteurs des forces en tension. Un des exemples les plus simples est représenté par ce mobile

C’est le sculpteur Snelson qui a réalisé au départ de nombreuses œuvres surtout des mobiles et de grandes « statues » comme la fameuse tour de Snelson

Tour de l'aiguille II par Kenneth Snelson dans le jardin de ...
30 mètres de haut !!

Ne dirait-on pas une belle posture , bien deployée, bien dynamisée?

Ces structures ont quelques caractéristiques bien particulières

-les éléments solides ne se touchent pas et sont reliés par des câbles tendus (élastiques ou pas)

-elles sont légères

-elles sont autocontraintes donc on peut les mettre dans toutes les positions spatiales quel que soit le point d’appui. (elles n’ont pas d’ancrage externe)

– tous les points sont reliés et travaillent ensemble, tout évènement toute pression est donc absorbé par l’ensemble de la structure qui revient à l’état initial à la fin de l’évènement (force, choc, vent….)

-elles sont auxétiques, point important. Si elles grandissent dans une dimension (par exemple haut/bas) elles grandissent simultanément dans les deux autres dimensions de l’espace (droite/gauche et avant /arrière ).De même si elles diminuent.

Puis des médecins et des biologistes se sont intéressés à cette conception qui permet d’expliquer certains phénomènes difficilement compréhensibles par la seule physique classique, par exemple comment pouvait tenir le cou d’un dinosaure ? Une idée nouvelle a toujours du mal à faire son chemin mais peu à peu l’idée s’est imposée que la nature utilise ce schéma pour construire les cytosquelettes et les fibres tissulaires. Les progrès techniques ont permis d’avancer dans l’observation des tissus vivants en particulier les fascias (antérieurement on était plus sur les tissus de remplissage). Il semble bien que la Vie ait choisi ce mode d’organisation de façon fractale  (par conséquent à toutes les échelles) donc aussi bien vers les éléments microscopiques que macroscopiques.

Cela nous amène à revisiter notre conception de l’organisation corporelle et par la même de nos postures. L’idée que l’on a d’une chose ou d’un évènement nous fait agir en conséquence. Par exemple nous avons tendance à penser que nos tissus mous sont accrochés sur nos os qui nous tiennent debout alors qu’il se peut que ce soit nos tissus mous (nos fascias, notre fascia) qui permettent à nos os de « flotter » dans notre volume. Nos os ne se touchent pas d’ailleurs, il y a discontinuité, ce qui est plus pratique question mobilité !

Bien sûr on peut toujours discuter, nous avons tendance à réfuter les nouveautés « bizarres »….mais laissez cela faire son chemin et avec la pratique nous pourrons rentrer dans l’expérience , le ressenti.

Mais nous sommes une structure tensègre très spéciale car il y a le  Souffle, il est au centre de notre édifice et le met en mouvement sans cesse  et d’autant plus que notre corps se laisse faire donc est en tension « juste » ni trop (le mouvement est bridé) ni trop peu (l’impulsion s’épuise dans le vide ou le mou). L’inspire induit une expansion multidirectionnelle, l’expire une densification recentrage . Tout l’art de la posture sera donc de trouver cette « justesse » : tension /compression répartie harmonieusement dans tous les  segments en même temps du bout des pieds au bout des mains et au sommet du crâne. TENSION /INTEGRITY.

Peut-être qu’un instant de réflexion et surtout de ressenti de ce qu’est un ballon gonflé à l’hélium peut nous permettre d’aborder cette notion de tenségrité : l’air est comprimé et donc générateur d’expansion, la paroi du ballon est tendue et génère donc de la compression. Si on prend le ballon entre les mains on peut sentir et les forces en expansion et les forces en compression selon la pression de nos mains et le placement de notre sensibilité.

Nous avons une autre particularité majeure, c’est la conscience dans laquelle baigne notre structure. Car il nous faut distinguer la « petite conscience » c’est-à-dire la proprioception (le sixième sens d’Alain Berthoz) qui nous permet de connaître le positionnement de notre corps dans l’espace, ses tensions…….et la grande Conscience dans laquelle flotte cette structure et qui nous relie aux autres et à l’univers. Conscience qui, d’abord réfutée par l’esprit occidental bien que toutes les Traditions la vivent, en particulier bien sûr, la tradition yoguique, commence à apparaitre comme une évidence nécessaire pour la physique moderne.

3/sentir la légèreté

D’abord voyons quelques exercices simples pour percevoir ce dont il est question.

a/ en position assise, prendre le temps pour chaque proposition d’écouter le souffle, de percevoir la colonne vertébrale et l’ambiance interne.

  • Assise classique à l’occidental avec le dos contre le dossier de la chaise et donc le bassin rétroversé
  • Assise un peu plus antérieure, le dos non appuyé sur le dossier
  • Même assise mais dans un premier temps les pieds tirent doucement vers l’arrière comme si on voulait reculer les talons mais ceux-ci restent sur place et la tête tire vers le haut et l’arrière, puis la posture établie on relâche les pieds et on observe
  • Plus simplement, on se balance sur les pieds avant de la chaise
  • Pour finir on reprend à l’occidental classique

b/ en position allongée sur le sol

      -allongé mais en appui sur le milieu du sacrum (donc pas de lombaire au sol)

On se relève sans s’appuyer sur les mains

            On se relève en tirant avec les bras vers l’avant et le haut (à peu près 45°) les doigts de main étirés

             On se relève en tirant avec les bras et les jambes, doigts de mains pieds en extension, nuque étirée

       -même progression mais cette fois avec les lombaires plaquées au sol

  • Une autre fois avec les pieds plaqués au mur (genoux un peu fléchis)

   d’abord en appui sur le sacrum

puis avec les lombaires plaquées au sol

dans les deux cas on pousse dans les pieds, avec les deux possibilités on peut explorer le rôle des bras puis des jambes puis des deux.

c/en position debout

   D’abord en statique

          -les pieds un peu divergents (comme souvent dans la vie courante)

            -un pied en avant d’environ un demi pied, pieds plutôt parallèles, poids dans les talons (remarquez la différence avec le poids dans les avant pieds) ici redressement automatique

            -les bords externes de pieds parallèles entre eux (un peu façon chasse neige dans la sensation), d’où antéversion et invitation à étirer la nuque

    Ensuite en marchant

              – dans la position habituelle de marche

              – avec l’antéversion (induite à partir des pieds, c’est important): liberté des hanches et propulsion

               – en rétroversion : comparez bien les deux points

d / avec un bâton à genoux debout

       En position à genoux debout, l’antéversion se met en place d’elle-même, on la confirme en appuyant la palette métatarso-phalangienne sur le sol (pour éviter de la conforter non pas avec les pieds mais avec le tronc ce qui induit une cambrure supplémentaire qu’il vaut mieux éviter car il ne faut pas confondre antéversion et cambrure, différence très importante)

      On monte le bâton (mains à peu près écartées comme les coudes quand les bras sont dans le prolongement des épaules) en faisant comme si on écartait les mains et en faisant de plus un contre appui avec le pouce vers l’arrière et le petit doigt vers l’avant de façon à mettre en place une rotation externe   des humérus ce qui permet la détente des épaules et, ce faisant, permet de descendre encore mieux les omoplates.

Quelques respirations dans la posture en accentuant les descente des omoplates sur les expires :

        Le thorax « sort » du bassin, il se produit comme une décoaptation ; on sent l’étirement de la peau du tronc et des membres, la colonne s’étire…. On s’envole

e/ contre-appui réel

    -avec la main-poignet contre le mur . Debout axe frontal perpendiculaire au mur , bras le long du corps, le poids dans les talons, la nuque bien étirée menton rentré sans excès, appuyer le poignet contre le mur et augmenter peu à peu l ‘intensité de l ‘appui jusqu’à très intense et puis faire un quart de tour pour tourner le dos au mur et laisser le bras « vivre sa vie ». Il monte sans aucun effort plus ou moins haut en fonction des résistances présentes et de l ‘énergie fournie, le laisser faire et le laisser redescendre comme il l’entend. faire l’autre côté.

    -avec les mains sur le sommet du crâne. Le corps bien en tadasana , bassin antéversé , poids dans les talons, comme précédemment poser le poignet d’une main sur le point de l ‘émergence de notre axe (disons le plus haut en arrière), poser ensuite l’autre poignet sur le premier, bien écarter les coudes latéralement et un peu en arrière puis appuyer de plus e plus fortement et observer….le départ en montgolfière!! Refaire ensuite la même procédure en étant rétroversé et une autre fois en ayant une lordose cervicale….tout change

Ces simples petits exercices, exécutés avec beaucoup d’attention, de conscience, portés par le souffle, nous font bien sentir toute une gamme de sensation allant de l’inertie pesante à la légèreté savoureuse de notre véhicule physique.

 Il s’en dégage quelques orientations :

-pour la plupart d’entre nous, très souvent, nous vivons en empilement, tassés, et en utilisant seulement certains secteurs de notre corps pour agir.

-le fait de créer du lien entre les extrémités et le tronc facilite considérablement les mouvements qui alors se font dans la globalité . Ils sont beaucoup plus harmonieux et faciles, voire déjà légers.

-pieds/bassin/nuque se répondent en permanence. Il importe de placer le bassin avec ses pieds et non avec son tronc, le résultat est très différent et bien sensible au niveau de la zone lombaire. Les pieds placent une antéversion et un étirement lombaire (lordose physiologique) tandis que le tronc place surtout une cambrure lombo dorsale beaucoup plus haute et plus accentuée. Le rôle de l’articulation L5/S1 n’est pas le même dans les deux cas.

-l’antéversion est facilitatrice, elle laisse passer le mouvement et l’énergie laquelle incite la nuque à s’étirer.  La rétroversion est inhibitrice elle fait comme un coupe circuit en ce sens bien perceptible (ce n’est pas une idée, c’est une perception) en ce sens donc que l’énergie qui part des pieds ne passe pas facilement au-delà du bassin, elle y est comme bloquée, n’arrive pas à la nuque et ce dans toutes les configurations spatiales.

Le travail dans la globalité du corps en essayant d’y créer de l’espace est donc vraiment important.

Le souffle est au centre, il initie le mouvement car nous sommes en quelque sorte « pré-cablés ». L’inspire nous offre une expansion, l’expire un recentrage.

L’expansion sera d’autant plus importante et vaste

-que la cage thoracique est bien malléable grâce à toutes ses articulations (102 paraît-il)

-que le mouvement initié par le souffle va être « aidé » par les cinq périphériques (mains, pieds, complexe nuque-yeux) qui s’harmonisent avec l’incitation centrale.

Prenons un exemple concret : en position assise, bassin antéversé sans forcer, les paumes (ou   mieux les dos) de mains sont posées sur le bas des cuisses. Alors quand vient une inspire, le fait de « tirer » les mains vers les hanches sans les bouger aide le mouvement physique d’expansion et permet donc au souffle de s’allonger, de s’étirer. De même le mouvement des pieds vers la chaise, « tirer » les pieds sans les bouger.  Au niveau de la nuque le fait de l’étirer en haut et un peu en arrière (complété si possible en baissant les omoplates) va aussi dans le sens du mouvement alors que la lordose cervicale nuit d’autant plus au mouvement qu’elle est accompagnée d’une montée des épaules. Bien sûr pour une expire les mouvements sont inversés.

Ce n’est pas un conditionnement mental car si l’on fait ces mêmes mouvements de mains, de pieds et de nuque sans respirer on constate les mêmes mouvements de la cage thoracique.

La simple écoute du souffle avec ces « mouvements » suffit peu à peu à créer du lien entre les cinq périphériques et le centre, à coordonner les cinq périphériques entre eux et cela devient une clef pour aller vers la sensation de globalité et de légèreté.

Dans toute posture il est donc primordial de s’interroger : que puis-je faire avec mes mains, avec mes pieds, avec ma nuque  pour épouser le mouvement de la Vie , du Souffle dans ce schéma postural. Il n’y a rien à savoir, il suffit d’expérimenter à chaque fois en sentant que dans une structure tensègre tout est en lien, tout se répond, il suffit d’essayer, d’écouter et le corps donne la réponse. La simple écoute du souffle nous fait bien percevoir l’expansion dans les trois dimensions, confirmant le caractère tensègre de notre structure.

Certains mots sont entre guillemets pour indiquer qu’en fait il y a une intention de mouvement mais pas de déplacement d’un segment corporel par rapport à un autre (par exemple la main reste à la même place sur la cuisse), seuls les tissus mous sont concernés. En effet dans cette simple mouvance l’énergie investie n’est pas dépensée par le mouvement mais il faut bien qu’elle aille son chemin et pour ce faire elle suit des trajets que l’on perçoit et qui sont , bien sûr, d’autant plus longs qu’il n’y a que peu de « frottements », d’obstacles c’est-à-dire ici de tensions parasites ou de blocage articulaire….

4/ La propulsion

La propulsion c’est le fait de mettre en mouvement mais pas seulement en avant, les synonymes dans le Robert sont : élan, force, impulsion, poussée. Pour nous, ici, ce n’est pas tant la mise en mouvement par rapport à un élément externe donc un  déplacement mais plutôt la mise en mouvement , en « mouvance », de notre structure corporelle elle-même pour sortir du tassement vers l’expansion multidirectionnelle.

A/ au niveau des pieds

Au cours de la marche d’abord la propulsion semble évidente…et pourtant ressentez en détail votre corps en marche et regardez (avec bienveillance et sans jugement) les autres marcher.

Et pourtant notre pied est vraiment conçu pour nous pro-pulser ce qui nous donne l’impression d’être poussé en avant ;

Le mécanisme est complexe (mettre un schéma)

(dans « le livre du pied et de la marche » Dr Bénichou et pr Libotte)

Pose du bord postéro externe du pied qui avance ,arrivé au medio pied, grâce à la composante en torsion de cette zone, la force traverse le pied de dehors en dedans et le relais est pris par le bord interne du pied dont le déroulement final d’abord avec la tête  ronde du 1° métatarsien( se comportant donc comme une rotule ou un cardan ) puis avec les phalanges en particulier la  première phalange du gros orteil (activée par le fléchisseur propre de l’hallux) qui fait tendre la jambe et l’on sent très bien la poussée qui monte dans tout le dos. Attention cela se produit ainsi si notre bassin est antéversé, pas s’il est rétroversé. Facile à vérifier :marchez comme d’habitude, puis antéversez votre bassin pendant quelques pas et observez puis rétroversez le et à nouveau observez.

Cela n’a pas grand-chose à voir avec ce que l’on peut observer le plus souvent : poussée partielle vite arrêtée à la tête du métatarsien ; très souvent c’est la cuisse qui est tirée en avant et le pied retombe plus ou moins lourdement sur le sol sans pouvoir utiliser le rebond fourni par une voute plantaire bien placée sur ses trois arches. (parler des kangourous ?)

Souvent tout cela est dû ou aggravé par nos chaussures-boîtes qui limitent la possibilité de déroulement du pied (d’où l’intérêt des chaussures dites minimalistes avec une semelle extrêmement souple).

Debout mais statique la façon d’habiter ses pieds peut faire de grandes différences.

-simplement bien écouter la différence entre le fait d’avoir les deux pieds plutôt passifs et avec les pointes un peu divergentes ou de paralléliser les pieds et simplement en avancer un d’environ un demi pied. L’effet est immédiat surtout si on place bien le poids sur le centre des talons, le recul du poids étant assuré par le recul du bassin et non celui des épaules.

-allons plus avant dans l’intensité de notre prise de terre : appui bien marqué de la tête du premier métatarsien d’où une petite sensation de rotation interne qui remonte jusqu’à la face externe de la cuisse (déclenchant ainsi une antéversion) puis, SANS LACHER CELA, appui sur le bord postéro externe du pied (donc un peu en diagonale si on veut) qui rétablit l’équilibre en déclenchant une rotation externe. Le fait de maintenir conjointement ces deux poussées , loin d’annuler les deux effets, les potentialisent et tout le membre inférieur s’élance dans son axe. C’est la partie basse de Tadasana, première phase incontournable de toute posture debout.

B/ au niveau du bassin

Ici apparaît un deuxième niveau de propulsion en partie effleuré avec les exercices initiaux pour sentir la légèreté. Le bassin est-il ou non une voie de passage pour l’énergie entre la poussée des pieds et la traction-poussée de la nuque ?

Antéversion : l’énergie passe et on sent la propulsion jusque dans l’occiput (d’autant mieux que la nuque est étirée et le poids dans les talons, le dos détendu)

Rétroversion : ça bloque, la force de propulsion reste  plus ou moins bloquée dans le bassin ou au mieux est très amoindrie.

Encore faut il s’entendre sur la notion d’antéversion et de rétroversion car la différence n ‘est pas aussi grande qu’on le pense habituellement ou que des vidéos un peu trop schématiques incitent à envisager. En fait quelques degrés suffisent pour bien passer d’un versant vers l’autre. De plus c’est une donnée individuelle, nous avons chacun notre antéversion, bien sûr elle peut varier un peu dans le temps mais pas énormément. Il ne faut surtout pas confondre antéversion et cambrure lombaire ou dorso lombaire encore moins. L’antéversion se met en place avec les pieds ou les jambes mais pas avec le tronc. La sensation est purement dans le bassin. Si on explore d’ailleurs les sensations en dehors de tout a priori intellectuel on observe qu’un petit changement en avant ou en arrière du bassin suffit à induire ce dont on parle ; alors, pourquoi forcer ??

Si on regarde bien en schématisant et en se plaçant dans le plan sagittal on trouve une disposition qui nous rappelle celle du pied dans le plan horizontal :

(mettre un schéma) le fût des membres inférieurs, puis le bassin antéversé et puis la colonne vertébrale en course longue (courbures physiologiques). La colonne commence bien sûr au coccyx et la charnière lombo-sacrée joue un rôle de ressort pour faire « tobogan » vers la tête (peut-être même vers   le ciel !!). Cette charnière source de tant d’ennuis dans un schéma en empilement joue un rôle de propulsion dans la structure tensègre, dans le volume en extension, en expansion. Elle peut être assimilée à un ressort. Dans un schéma en expansion il joue son rôle et propulse, s’il est dans une autre configuration  en empilement il est comme écrasé/aplati d’où l’extrême  fréquence des problèmes L5/S1 L4/L5.

Ce schéma se retrouve dans de très nombreuses postures, en particulier l’assise que nous décrirons en détail plus tard.

L’antéversion déclenche le phénomène de la poutre composite para et péri vertébrale nous offrant cette savoureuse sensation du thorax qui se détache du bassin, le thorax flotte comme libéré de la traction du bassin. Cette libération du caisson respiratoire libère aussi la caisson abdominal qui reprend son espace , le souffle s’en trouve libéré. Cela est dû à la contraction musculaire en EXCENTRIQUE des abdominaux en avant et latéralement tandis que le psoas, un peu plus en arrière le carré des lombes et tous les muscles périvertébraux eux aussi se contractent en excentrique.

Tout cela permet une libération du diaphragme, donc une libération de la respiration et donc du souffle.

Là encore il est facile d’explorer la grande différence entre antéversion qui propulse et rétroversion qui bride. Il suffit d’observer.

C/ au niveau du cou (cou /tête /yeux)

Notons d’emblée l’analogie structurelle entre la région abdominale et la région cervicale ; un support osseux en lordose plus ou moins accentuée, une gaine musculaire périphérique qui peut être insuffisante entraînant alors un rapprochement de la tête et de la ceinture scapulaire par effondrement relatif ( contraction concentrique ou insuffisance) ou peut être tonique, en excentrique (ce qui n’’est pas synonyme de rigidité) avec la sensation de la tête qui est dégagée des épaules devenues basses de même que les omoplates.

Ici il y a deux temps liés :

Repousser le ciel avec le sommet du crâne pour relier nos cervicales et nos dorsales en réduisant au mieux la lordose cervicale et simultanément reculer le cou (menton rentré sans excès) en dynamisant vers le haut et l’arrière de façon à sentir l’étirement, en avant,  de la peau de la région du manubrium sternal et de la zone sous claviculaires et que l’on ouvre, en arrière, le pli cervico-occipital ; Ce pli a une importance majeure dans les traditions orientales tant en acupuncture qu’en ayurvéda (c’est , entre autres, le siège du padma d’ajna).

Les muscles de soutènement de la région cervicale répondent en particulier aux muscles de la poutre composite abdominale et probablement de deux façons différentes ; sur le plan neurologique donc par notre système nerveux et ses commandes réflexes mais aussi, dans un tout autre registre purement mécanique, sur le plan de notre structure tensègre où par le biais des fascias toutes les parties sont connectées de façon non neurologiques.

Ces trois niveaux (pieds/bassin/nuque) interagissent en permanence

Soit dans le sens d’une dynamisation allant vers la légèreté et alors en particulier notre charnière lombo sacrée fonctionne comme un ressort efficient soit dans le sens d’un empilement plus ou moins effondré et alors notre charnière lombo sacrée est malmenée comme un ressort plus ou moins rouillé et mal positionné.

Dans un cas la légèreté, le lien, la matière et la vie qui danse : c’est la version tensègre (tension – globalité)

Dans l’autre cas la lourdeur, la surcharge, la matière et la vie sont pesantes et tristes, c’est la version empilement, survie.

Mais alors, pourquoi jaillir, s’élancer ??

Où vas-tu ? Ne sais tu pas que le ciel est en toi ? (Christiane Singer)

Simplement pour être là, dans un espace heureux , à vivre et remercier la Vie.

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